C’était quand la dernière fois

Parfois, pour ne pas dire souvent ni la plupart du temps, la vie nous envoie des signes, un message, une parole ou encore une chanson qui nous fait vivre toutes sortes d’émotions. Ce matin, j’étais dans ma voiture et j’ai entendu le nouvel extrait d’Andréanne A. Malette qui s’intitule «Entre ici et ailleurs». Ce n’était pourtant pas la première fois que j’entendais cette chanson, la preuve, j’étais capable d’en fredonner le refrain comme quoi mon cerveau avait déjà en registré ces paroles dans un petit coin caché de ma mémoire. Toutefois, c’est uniquement ce matin que ces quelques mots ont fait du sens à mes oreilles. Le début de la chanson jusqu’au refrain a résonné très fort dans mon cœur et je me suis surprise à me dire : «Hey bien, fille, cette chanson a peut-être été écrite pour toi !» Voici les fameuses paroles en question :
Danse les pieds sous la table
Chante en silence
Tout le monde te regarde
Mange, mais pas trop
Ne pense pas tout haut
Et fait toujours ce qu’il faut
Si toi aussi, tu t’effaces pour ne pas déranger
Moi, je te dis : danse sur le rythme des battements de ton cœur
Écris ta musique et montre tes couleurs
Ose prendre place et surtout n’aies pas peur
De quitter les traces entre ici et ailleurs
Cette chanson m’a permis de me questionner sur la place que je laissais à ma créativité, à mon plaisir, à prendre le temps et à seulement vivre le moment présent pour un instant. Je me suis demandé, c’était quand la dernière fois que je suis allée danser ? J’ai cessé ma recherche quand je me suis rendue compte que la réponse ne venait pas ! Pourtant, de l’âge de trois ans à dix-neuf ans j’ai suivi des cours de danse. Ma mère se plait même à me raconter que j’ai commencé à danser avant même de savoir marcher. J’ai essayé plusieurs styles : ballet jazz, hip hop, danses latines et j’en passe. Oui j’ai subi deux accidents qui ont endommagé mes genoux, mais aujourd’hui, à l’aube de mes trente-deux ans, ils sont bien solides ces genoux-là ! Pourquoi donc me priver de ce bonheur et de cette passion qui m’animait ? Je dois y réfléchir !
C’était quand la dernière fois que j’ai mangé quelque chose d’ultra riche, savoureux, plein de saveurs sans me dire au fond de moi : maudine que c’est bon, mais câline que ça va me coller au fesses ? Pourtant, si l’on retourne à la base, s’alimenter fait parti de la vie et même de la survie ! Je ne rejetterai pas la faute sur les diktats de la société, sur le culte de la minceur ni sur les effets, parfois néfastes, de la publicité. Je crois que cette pression et cette vision de mon corps m’appartiennent et partent de moi et que malheureusement, je m’empêche bien souvent de me faire plaisir au détriment du potentiel jugement des autres sur mon apparence physique.
C’était quand la dernière fois que j’ai réellement osé dire ce que je pense tout haut sans la peur d’être jugée ou sans avoir peur de déranger ? Je me plais à dire que l’une de mes belles forces est que je ne parle pas pour rien dire et que je prends le temps d’analyser les répercussions et les opportunités avant de parler ou de prendre une décision. Cette chanson m’a fait prendre conscience que je tuais plutôt, à petit feu, mon honnêteté et ma spontanéité. D’ailleurs, combien de fois ai-je répondu que je suis un caméléon lorsque l’on me demandait quel animal me représentait lors d’entrevues d’embauche ? Si ce n’est pas cela se fondre dans le moule ou s’effacer, je ne sais bien pas ce que c’est.
C’était quand la dernière fois que j’ai osé chanter devant quelqu’un ou prendre le temps de dessiner, de lire un livre pour le plaisir ou encore d’écouter un film au complet sans m’endormir, car je suis trop crevée et exténuée ? Pourtant, j’ai suivi des cours de chant pendant de nombreuses années. J’ai participé à plusieurs spectacles et comédies musicales, j’ai gagné des concours et j’ai même enregistré certaines de ces chansons sur des albums. Je me suis même surprise, il n’y a pas si longtemps, à prendre plaisir à montrer à mon fils comment dessiner et finalement, j’ai eu plus de plaisir que lui !
Bref, les réponses à toutes ces questions ne sont pas, pour le moment, si importantes à connaître. Ce que cette chanson m’a fait réaliser, c’est à quel point je m’étais oubliée entre deux brassées de lavage, la préparation des repas, m’assurer que mon garçon ne manque de rien, travailler et assumer mes responsabilités d’adulte. Ce que je peux répondre, toutefois, c’est que cette année, je veux essayer de saisir davantage l’instant présent, m’amuser et prendre le temps de me recentrer et de me faire plaisir ! De toute façon, ce n’est pas moi qui serai égoïste, c’est Andréanne A. Malette qui me l’a suggéré !